Médaillée de bronze en relais à seulement 17 ans aux Jeux Olympiques de Londres en 2012 et non médaillée à Rio quatre ans plus tard, Charlotte Bonnet a déjà connu beaucoup d’émotions différentes dans cette grande compétition. A moins de six mois du début des Jeux Olympiques de Tokyo, la Française s’est confiée pour Le Sport Au Féminin. Extraits.
A 25 ans, Charlotte Bonnet est la tête de file de l’équipe de France féminine de natation. Pas encore qualifiée pour Tokyo, la Tricolore devra batailler lors des Championnats de France mi-avril à Chartres. La nageuse française espère surtout être présente au Japon sur le 100 et le 200m nage libre. En espérant aussi tenter de jouer la qualif’ pour le 50m. Son programme s’annonce très chargé jusqu’à Tokyo, et elle espère bien être de la partie pour jouer les premiers rôles. Entretien exclusif avec la double championne de France en titre du 50, 100 et 200m nage libre.
Comment allez-vous à moins de six mois des Jeux Olympiques ?
Ça se passe bien. Ma préparation a été bonne. J’ai dû gérer une blessure en septembre mais tout est rentré dans l’ordre assez vite. Tout va bien. Après, c’est toujours particulier une année olympique. Nous ne sommes pas encore sûrs d’aller à Tokyo et il faut passer par les qualifications. Il y a toujours un stress particulier. Il faut être plus fort que jamais dans la préparation.
Comment s’est passé votre récent week-end à Nice où vous avez remporté le 100m et le 200m ?
Je me suis sentie plutôt bien. C’était une compétition de travail car nous ne sommes pas tous prêts. C’est intéressant de voir où l’on se situe. J’ai fait des courses un peu particulières mais j’ai aussi l’expérience de ces courses-là. J’ai pu me jauger par rapport au travail du mois de février. Je n’ai pas été surprise de gagner car sur le 100 et le 200 il y avait de la concurrence, mais peut-être moins que sur d’autres distances. Je suis contente quand même d’avoir remporté ces courses. Gagner à Nice, c’est toujours important.
Vous n’êtes pas encore qualifiée, tout va se jouer lors des Championnats de France à Chartres ?
Tout se jouera du 14 au 19 avril. Il faudra être présent le jour J. Faire un bon temps le matin et être dans les deux premières le soir. Le principal objectif est le 200 mais j’apprécie aussi le 100m où je prend beaucoup de plaisir. Je tenterais aussi ma chance le dernier jour sur le 50m. Je pense que ça sera possible de jouer les deux premières places. Mais il faut aussi faire les temps le matin et c’est en fin de semaine, donc je n’aurais pas la même pression. Je n’aurais pas de déception si je n’ai pas cette qualification sur le 50. Le 100 et le 200, c’est l’objectif numéro 1.
Est-ce difficile pour vous de ne pas encore être sûre de participer aux Jeux Olympiques ou arrivez-vous à gérer cela ?
Pour l’instant, je n’ai pas grand chose à gérer dans le sens où je m’entraîne tous les jours. Je me concentre actuellement sur l’entraînement et la préparation. Je m’évalue aussi en fonction des temps que je réalise à l’entrainement. C’est l’essentiel du travail. Je me poserai vraiment la question de cette qualification quelques jours avant le début des championnats.
En cas de qualification, quels sont vos objectifs pour Tokyo ?
Sur le 100m, j’aimerais bien accrocher une finale car il y a un niveau assez relevé. Concernant le 200m, j’y crois pour une médaille. Il y aussi une telle densité sur les courses que je dispute que ça va encore être très serré. La bonne nouvelle, c’est que j’ai chaque fois atteint la finale dans les récents grands championnats. Même si je ne suis pas toujours montée sur le podium. Souvent, ça se joue à pas grand chose et l’écart peut être minime entre la deuxième et la sixième place.
A 17 ans, vous avez été médaillée de bronze sur le 4X200 m aux JO de Londres. Pouvez-vous nous raconter ce souvenir ?
Je me rappelle de beaucoup de choses ce jour-là mais ça reste flou. Tout est passé très vite. Je n’avais pas fait les séries et je n’étais rentrée que pour la finale. J’avais pas mal de pression mais j’étais assez décontractée car j’étais jeune. On n’a eu aucune pression même si on y croyait fort individuellement. A l’arrivée, quand c’est Coralie qui touche et que l’on voit que nous sommes troisièmes, c’est juste incroyable. Tout s’est enchaîné. Je me rappelle de presque rien. On était dans l’euphorie totale. C’était un moment extraordinaire.
Lors des JO 2016, vous avez terminé huitième de la finale du 200m. Ces derniers Jeux ont-ils été décevants pour vous ?
En 2016, je ne suis pas arrivée dans la forme de ma vie. Mentalement c’était compliqué. Je ne peux pas être déçue car j’ai fait ce qu’il fallait. Je suis rentrée en finale sur tous les championnats. Je suis assez fière de ça. Je ne m’attendais pas forcément à une médaille. J’ai fait mes Jeux à fond donc je ne peux pas parler de déception.
Pouvez-vous nous raconter votre année 2019 que vous avez défini comme étant « bizarre » ?
C’était aussi compliqué car j’ai fait un super bon début de saison de septembre à février puis je me suis blessée avant les Championnats de France. Moralement, ça m’a affecté. Tout s’est enchaîné et je n’ai pas réussi à me soigner. J’ai essayé de garder le moral mais c’était compliqué, je suis arrivée en étant un peu mal, sans y croire. On a décroché une médaille en relais mixte et ça m’a fait énormément de bien. Individuellement c’était une année décevante.
Est-il vrai que vous faites aussi du taekwondo pendant votre préparation ?
J’en ai fait l’année 2018 et 2019 et j’ai arrêté pour l’année olympique. Ça m’a appris beaucoup de choses. J’ai développé des compétences et des muscles que l’on n’a pas l’habitude de travailler en natation. On a décidé avec mon entraîneur de stopper cette année pour se consacrer vraiment à la natation. Le taekwondo m’a aussi aidé mentalement pour puiser dans mes limites et pour combattre. Ça m’a appris à avoir un regard face à l’autre.
Vous-êtes aussi une leader quand il s’agit de soutenir le sport féminin …
C’est quelque chose qui me tient vraiment à cœur. On ne parle pas assez des résultats du sport féminin même si ça change petit à petit. On parle forcément des garçons et d’autres sports collectifs comme le basket et le hand. Même si les résultats de Laure Manaudou nous ont aidé. Parfois, on avait aussi des regards péjoratifs de la part de la presse. Je défends beaucoup cette cause et je pense qu’il faut en parler plus. Il y une égalité en terme de résultats. Un champion de France ou une championne de France devrait avoir la même visibilité. Il faut qu’on en parle de façon égale. Il y a des progrès à faire dessus aussi.
Quel regard portez vous sur le niveau des Françaises en natation ?
Il y a beaucoup de têtes d’affiche qui ont arrêté récemment. Chez les femmes, on a bien réussi à performer lors des Championnats d’Europe 2018. Nous avons eu des médailles et des titres. Il y a eu un petit peu de renouveau. Je pense que ça va aller de mieux en mieux même si je ne connais pas toutes les jeunes françaises. Je pense qu’il y a du beau potentiel pour 2024 et déjà en 2020, on risque d’avoir une belle équipe. Je suis confiante pour l’avenir de la natation française et du sport féminin.
Vous semblez quand même être la tête de file de cette équipe de France ?
Je ne me sens pas comme la leader ou la tête d’affiche de la natation française. J’essaye de faire mon travail de mon côté. On me considère peut être plus comme une leader en raison de cette présence en équipe de France depuis de longues années. J’ai un peu connu toutes les phases qu’un sportif peut connaître. Je pense que c’est pour ça qu’on me prend pour une leader. Je ne me prend pas trop la tête par rapport à ça. Je vis mon aventure de mon côté.
Avez-vous un rêve ?
Dans le sport, je pense que mon rêve est d’être championne olympique. Un rêve est fait pour être réalisé. Une médaille en individuel ça serait déjà bien. Je ne pense pas que je serais meilleure en 2024 car j’ai commencé très jeune. Je pense que je vis actuellement mes meilleures années. Si je continue jusqu’en 2024, il me faudra cette motivation, mais chaque année est importante. Je me poserai vraiment la question après Tokyo.
Photo à la Une : (@DR)
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