A seulement 24 ans, Manon Brunet est l’une des valeurs sûres du sport tricolore. La sabreuse fait partie de nos dix marraines. Elle s’est confiée à nous, en revenant sur son enfance, son début de carrière et surtout ses rêves olympiques. Portrait.
Le 7 février 1996 à Lyon, la petite Manon naissait. Une fille unique qui compte beaucoup pour ses parents, eux-mêmes très sportifs à l’époque. Son papa était même en équipe de jeunes à l’Olympique Lyonnais. Sa maman quant à elle, a été championne de France en barque. De quoi augurer pour Manon un avenir sportif. Justement, le sport a très rapidement fait partie de sa vie : « J’ai toujours fait du sport. D’abord du taekwondo, puis de la danse en CP, mais ça ne plaisait pas trop. Une des mes amies s’était mise à l’escrime, je l’ai suivi un an après. Du CE1 à la seconde, je suis restée dans un petit club à Rillieux-la-Pape (dans la banlieue de Lyon). » Manon Brunet se rappelle également d’une petite anecdote qui, plus de dix ans après, fait toujours écho à son mental de championne : « Certaines filles de mon club sont parties au Pôle, j’étais donc la seule fille à Rillieux. Je m’entraînais qu’avec des garçons et j’ai même gagné les Championnats de France, alors que j’avais pensé à arrêter l’escrime. Mais j’adorais trop ce sport pour ne pas continuer. Finalement j’ai adoré être la seule fille ! »
Le grand départ pour Orléans
Le club de la banlieue lyonnaise est ensuite devenu bien trop petit pour une adolescente qui ne pensait qu’à une seule chose : être performante dans son sport de prédilection. A 15 ans, Manon intègre le Pole Espoir d’Orléans : « On s’entraînait qu’entre filles et au début ça m’a fait bizarre. Je cherchais les garçons pour pouvoir rejouer contre eux. » Ce départ de Lyon pour rejoindre le Loiret a été un véritable tournant dans la vie personnelle de la Française : « J’ai quitté mes parents à l’âge de 15 ans. Je suis fille unique donc c’était un peu dur pour eux au départ et même pour moi, mais au final ça a été. C’était une étape très importante et mes parents ont validé le fait que je parte. Ils m’appelaient souvent et j’avais aussi un entraîneur très à l’écoute. Je pense que ça s’est très bien passé grâce à l’internat où nous étions étions restreints par les horaires ». Histoire de ne pas trop se laisser tenter par des bêtises et se concentrer uniquement sur son escrime et sur sa progression scolaire.
Deux points très importants pour que le père de la sabreuse valide son départ pour Orléans : « Un jour, un entraîneur a été voir mon père pour que j’aille au Pôle. Mon papa m’a alors demandé si j’en avais envie et quelles ambitions j’avais. Et je lui ai répondu que j’en avais très envie. On s’est posés pour y réfléchir. Mon père m’avait carrément dit : « si tu n’es pas dans les deux premières Françaises, tu n’iras pas ». J’ai atteint l’objectif qu’il m’a fixé. Je suis partie ». Avec un petit pincement au coeur, comme le raconte Manon : « Ma mère était triste à chaque fois qu’elle me laissait à la gare. Un jour, je lui ai même dit d’arrêter de m’amener. Ça me faisait de la peine de la voir pleurer comme ça. »

Après le Pôle, l’INSEP
Restée trois années au Pôle Espoir d’Orléans, la Française est toujours obnubilée par son envie de réussir en escrime. Un nouveau tournant dans sa jeunesse a lieu en septembre 2013, lorsqu’elle est appelée à intégrer le groupe INSEP. Un passage obligé pour atteindre le haut niveau, permettant à la Lyonnaise de continuer à évoluer aux côtés des meilleurs encadrants tricolores. Mais quand a-t-elle pensé qu’elle allait devenir professionnelle ? Elle répond simplement : « Lorsque je me suis dit que je pouvais commencer à être forte en 2014. C’était devenu concret. Je faisais les Championnats du monde en juillet et je passais mon bac en septembre. » Bilan : une médaille
d’argent en équipe et un diplôme obtenu. Ses parents pouvaient être rassurés, Manon avait réussi à combiner sport et études. Néanmoins, son objectif était resté le même : percer dans sa discipline sportive. Ce qu’elle a réussi à faire quelques années plus tard. C’était il y a six ans, et que de chemin parcouru pour l’une des meilleures sportives tricolores actuelles.
Des émotions exceptionnelles vécues à Rio
Présente pour la première fois de sa carrière aux Jeux Olympiques à Rio en 2016, Manon Brunet arrive à atteindre les demi-finales en individuel avant de s’incliner et de perdre également la petite finale. La même année, elle remporte la première étape de Coupe du monde de sa carrière. Une année charnière qu’elle s’est remémorée lors de notre entretien téléphonique : « 2016 a été assez dingue. Je me suis déboité l’épaule trois mois avant les Jeux Olympiques et je me suis dit que je n’étais pas sûre d’être qualifiée pour ce rendez-vous planétaire. Je n’ai donc pas pu faire les dernières phases de qualification. J’ai paniqué puis je me suis soignée avant de finalement partir pour le Brésil et de terminer quatrième en individuel. Je pensais venir chercher une médaille par équipe, mais lors de cette journée je n’ai jamais aussi bien tiré de ma vie. J’ai vécu un maximum d’émotion à un niveau très élevé. »
Avant d’ajouter : « Il y avait de la déception, forcément, d’avoir perdu en demi-finale et surtout de ne pas avoir réussi à gagner une médaille par équipe. On était toutes au bout du rouleau. Mais quand j’ai repris l’entraînement en septembre, j’étais tellement contente de reprendre l’escrime. J’avais vraiment l’envie lors de la première compétition, car je ne voulais pas qu’on pense que j’avais fait quatrième aux Jeux et que je ne ferais plus rien après. Ce n’était pas juste la réussite d’un jour. J’ai ensuite gagné une étape de la Coupe du monde à Orléans. C’était une belle revanche. Je voulais prouver à tout le monde que je n’étais pas forte seulement aux Jeux Olympiques. »

Un palmarès qui fait rêver
Rassurez-vous, la carrière de Manon Brunet ne s’est pas arrêtée en 2016. Bien au contraire. Aujourd’hui, à seulement 24 ans, la Française possède un très beau palmarès, notamment par équipe. Championne du monde avec ses coéquipières de l’équipe de France en 2018, vice-championne du monde un an plus tard avec Cécilia Berder, Caroline Quéroli et Charlotte Lembach, multi médaillée par équipes lors des Championnats d’Europe, elle a déjà prouvé avec ses amies bleues, qu’elles étaient capables d’atteindre les sommets du sabre mondial. En individuel, le bilan de la Lyonnaise est aussi de très bonne facture puisqu’elle a notamment remporté cinq étapes de Coupe du monde dont deux en 2019 (à Orléans et à Niklaas en Belgique).
Mais la championne en veut toujours plus. « Je trouve ça cool, mais je ne suis pas satisfaite. Quand on me dit que j’ai un très beau palmarès, ça me fait plaisir, mais je veux des médailles en individuel. On a remporté de très belles breloques en équipe, mais je sais que je peux y arriver seule sur des grands championnats. Le stress joue aussi. » L’escrimeuse n’a qu’un seul objectif en tête : « être championne du monde et olympique. » Autant dire qu’elle sera de nouveau très attendue à Tokyo dans un peu moins d’un an. Nous espérons tous entendre la Marseillaise résonner au Japon pour une médaille d’Or de Manon Brunet. Elle pourra ainsi lever son sabre et crier : « Je l’ai fait ! »
Photo à la Une : (@FFE)
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