Lara Grangeon a tout connu dans l’eau. Passée des bassins à l’eau libre en 2016, la Française visera une médaille sur le 10km lors des Jeux Olympiques de Tokyo cet été. En pleine préparation pour ce rendez-vous forcément très important pour elle, la Tricolore de 28 ans s’est confiée pour Le Sport Au Féminin. Entretien.
Ne parlez plus de bassin ou de petits carreaux à Lara Grangeon, l’ancienne star du 4 nages tricolore a décidé de changer de vie. En 2016, juste après les Jeux Olympiques de Rio, elle décidait de changer de discipline. La Française, qui aime toujours autant l’eau, s’est concentrée depuis sur l’eau libre. Une discipline en plein air qui est très stratégique avec la décision de prendre tel ou tel cap afin d’aller le plus vite possible.
Comme un poisson dans l’eau, la Néo-Calédonienne détentrice du record de France du 400m 4 nages en petit bassin, apprécie sa nouvelle vie de spécialiste de l’eau libre. Et à 28 ans, elle ne rêve que d’une chose : remporter une médaille aux Jeux Olympiques à Tokyo. Entretien exclusif avec une sportive qui est déjà très fière de tout ce qu’elle a accompli depuis le début de sa carrière. Et qui ne veut pas surtout pas s’arrêter en si bon chemin.
Comment vous sentez-vous à six mois du début des Jeux Olympiques ?
On est à quelques mois des Jeux et je suis actuellement en pleine préparation. Je me sens plutôt bien. C’est une période où on s’entraîne plus et où on essaye de faire beaucoup de kilomètres pour travailler la caisse (la condition physique) et aujourd’hui, je me sens plutôt confiante par rapport au travail effectué.
Quel est votre programme jusqu’à cet été ?
J’ai décidé de faire une grosse préparation avec beaucoup de kilomètres pendant les entraînements mais aussi de faire de nombreuses courses. J’ai fait Doha il y a quelques semaines et là je vais faire une Coupe du monde aux Seychelles, une Coupe de France en Martinique. Je vais enchaîner avec d’autres compétitions comme les Championnats de France, une Coupe d’Europe à Barcelone, les Championnats d’Espagne et une étape de la Coupe du monde en Hongrie. Le but est de prendre de l’expérience. Toutes ces confrontations vont êtres importantes pour voir mon niveau par rapport aux autres filles mais aussi d’un point de vue tactique. Le cap et la prise de décision sont très importants en eau libre. Il faut que je fasse des courses pour apprendre et continuer à prendre de l’expérience.
Lara Grangeon devait disputer ce week-end la Coupe d’Europe d’Eilat qui a été annulée en raison de l’épidémie du coronavirus*
Vous avez terminé quinzième du 10km en eau libre de la Coupe du monde mi-février à Doha. Que retenez-vous de cette journée ?
C’était une Coupe du monde un peu particulière car l’eau était très froide contrairement à l’eau que l’on aura aux Jeux Olympiques. L’eau de Tokyo sera à 30 degrés alors qu’à Doha on a nagé dans une eau à 17 degrés. C’est des conditions qui sont différentes. Nos combinaisons étaient en néoprène et c’est quelque chose que je n’aime pas du tout. Mais c’était important de prendre le départ de cette course car il y avait toutes mes concurrentes directes. C’était important pour l’expérience et je ne suis pas du tout inquiète par rapport à ce résultat. Ce n’est pas une place satisfaisante mais au vu de la période et des conditions, je m’en contente.
Est-ce que l’épidémie de coronavirus pourrait remettre en cause votre participations aux JO ?
Pour ma part, le coronavirus ne m’empêchera pas de prendre part aux Jeux Olympiques. J’irais à Tokyo si j’ai le choix d’y aller. C’est plus en fonction d’une décision politique et si jamais les JO sont reportés ou annulés, je ferais par rapport à ce qui se passera. Si la France décide de ne pas y participer, je ferai mes choix en fonction des décisions prises par les gens au-dessus de moi. Mais je pense que je prendrais part aux Jeux Olympiques si j’ai la possibilité d’y aller toujours en prenant les précautions nécessaires. Je pense qu’il ne faut pas non plus arrêter de vivre par rapport à ce virus. Si j’ai le choix, je prendrais part à cet événement mondial.
Vous êtes une ancienne spécialiste du 4 nages en piscines. Pourquoi avoir décidé de quitter les bassins pour pratiquer de la natation en eau libre ?
J’ai passé énormément de temps dans les bassins. J’étais une nageuse de 4 nages et de papillon. En 2016, après les Jeux Olympiques de Rio, j’ai décidé de finir mes études (master de management du sport à Marseille) et c’est une année où j’ai laissé un peu de côté la natation. Et c’est comme ça que l’eau libre est apparue comme une évidence. C’est une discipline qui m’a toujours plu, toujours tentée et puis à ce moment-là de ma carrière, j’avais envie de changer. Vu que j’adore nager, que je prend toujours autant de plaisir dans l’eau, je me suis dis que j’allais essayer avec un autre objectif et c’est comme ça que je me suis mise à l’eau libre. C’était d’abord un premier objectif en tant que découverte puis je me suis prise au jeu. Ça m’a tout de suite plu et j’ai eu envie d’en faire de plus en plus.
Vous étiez la première nageuse française sélectionnée pour Tokyo. Est-ce une fierté ou est-ce anecdotique pour vous ?
Oui, j’étais la première nageuse tricolore à être qualifiée pour Tokyo. C’est une fierté de représenter son pays, la France, la Nouvelle-Calédonie, mon club. Tout ça, j’en suis vraiment très fière. Mais le fait d’être la première ou la dernière qualifiée, ça ne change pas grand chose. Il me semble que c’était déjà le cas en 2012. Après, c’est plus anecdotique. Je retiens surtout le plaisir que j’ai de représenter mon pays. C’est fou et c’est ça qu’il faut retenir. Les Jeux Olympiques ont toujours été un rêve pour moi quand j’étais petite et qu’aujourd’hui ça se concrétise, c’est juste génial. Ça donne envie de se surpasser et de représenter au mieux les personnes qui nous aident et qui nous soutiennent au quotidien pour donner le meilleur de nous-mêmes. Il y a énormément de personnes qui sont bienveillantes avec moi et c’est ça qui me motive et qui m’aide. Il y a des moments où c’est difficile d’être sportive de haut niveau mais y a aussi des moments où il y a tellement d’échange et de partage que c’est magnifique. C’est aussi ça qu’il faut retenir.
Vous avez participé à deux olympiades. Quels souvenirs gardez-vous des Jeux Olympiques ?
J’ai participé aux Jeux Olympiques de Londres et là c’était un rêve qui devenait réalité. Je me souviens d’être entrée dans la piscine avec tout ce monde dans les tribunes. Mes parents étaient là. De prendre part à cette compétition, c’était vraiment un rêve qui devenait réalité. C’est un des plus beaux souvenirs que j’ai dans ma vie. Après, j’ai eu la chance d’être aux côtés d’une équipe de France spectaculaire à ce moment-là. Il y avait eu beaucoup de médailles aux JO de Londres. Voir toutes ces personnes qu’on côtoient au quotidien êtres médaillées olympiques ou mêmes championnes olympiques, ça nous montre que c’est bien réel. Ça donne envie de faire encore mieux aux Jeux d’après.
Vous allez participer aux JO sur le 10km en eau libre, quels sont vos objectifs sur cette course ?
Je vais prendre part au 10km à Tokyo et je ne ferai que cette épreuve. Je n’ai pas pour ambition de me qualifier en bassin parce que je veux rester focus sur l’eau libre. J’ai terminé quatrième aux Championnats du monde l’année dernière donc on essaye de toujours faire un peu mieux. L’objectif sera de décrocher une médaille le 5 août et il faudra être en forme ce jour-là pour essayer de donner le maximum et faire du mieux possible en tout cas.
Pensez-vous continuer votre carrière jusqu’au Jeux de Paris 2024 ?
Paris 2024 ? Effectivement, ça fait rêver, parce que c’est à domicile. Je ne peux pas vraiment me prononcer maintenant. Bien sûr qu’on a toujours envie de se projeter sur Paris 2024 car c’est encore plus fabuleux d’avoir les Jeux à la maison et que j’adore nager. J’aurais toujours envie de m’entraîner mais je ne sais pas. Une Olympiade c’est beaucoup d’entraînements, beaucoup de petits efforts au quotidien, pas beaucoup de temps avec sa famille. Il faut prendre tout ça en considération. Aujourd’hui, j’adore ce que je fais, je le fais avec plaisir et envie, mais je me laisse l’opportunité de continuer et on verra plus tard.
Photo à la Une : (@FFN)